LES ÉCOLES PRIMAIRES DU GUELIZ

RÉCIT D'UN ÉLÈVE DES ANNÉES 1936-1942. (2e épisode) LES CLASSES
Ce récit commence par un 1er épisode concernant la rue Maginot (Archives d'octobre, le 22)
   
Nous vivions tous dans la sécurité, le bonheur et l'insouciance; nos parents veillaient sur nous, personne ne traînait dans la rue. Du lundi au samedi Grand père nous accompagnait à la rentrée de l'école  et nous récupérait à la sortie matin midi et soir.  L'école  était assez loin, il nous fallait descendre un bout d'avenue Mangin devant le marché,  après la quincaillerie Mallet, tourner à gauche prendre la rue de la Liberté ; en passant Grand père nous achetait un croissant chez Mirgon. À la hauteur de l'hôtel Majestic et de la Cité Fouque on tournait à droite et  descendions la rue Clémenceau (el Mansour-eddahbi) jusqu'à l'avenue de Casablanca(Mohamed abdelkrim Khattabi) pour se trouver presque en face de l'école du Guéliz . Les garçons portaient  un tablier noir obligatoire, les filles des tabliers en tissu à carreaux bleu ou rose, nos tabliers amoureusement lavés et repassés par les mamans fleuraient bon le savon de "panama", dont le parfum délicat envahissait la salle de classe ou se tenaient "à carreau" quarante petits diables au visage d'ange.
          L'école du GUELIZ,  je devrais dire le groupe scolaire, car en fait il y avait deux écoles cote à cote ,et parfaitement symétriques, celle des garçons à gauche celle des filles à droite. La façade était un long mur crépit et peint couleur jaune d'ocre; les entrée symétriques elles aussi, situées presque aux extrémités opposées se composaient, d'un portillon et d'un portail en fer d'environ un mètre quarante de haut, deux décimètres plus bas que le mur, de chaque coté du mur mitoyen qui   séparait les deux cours se trouvaient les logements du directeur et de la directrice prolongés de chaque coté par un préau, à l'autre extrémité de ce mur une dizaine de WC à gauche autant à droite; la cour des garçons d'environ  quatre vingt mètre de long sur trente à quarante de large était plantée de trois rangées d'arbres au milieu desquels trônait un grand palmier flanqué d'un plus petit. A gauche de la cour s'alignaient huit salles classes en un long bâtiment parallélépipédique peint de la même couleur que le mur qui enfermait l'ensemble. Outre la porte qui s'ouvrait à gauche, chaque salle était éclairée sur les deux faces de trois hautes fenêtres, un trottoir surélevé et une haie de troënes courait tout le long du bâtiment.. En entrant dans les salles peintes en blanc on trouvait  à main gauche une armoire bibliothèque une estrade de bois, un bureau fermé et le triptyque du tableau noir, en face duquel s'alignaient trois rangées de huit  pupitres doubles; le mur du fond était décoré de dessins et de travaux d'élève. Le sol était une seule dalle de granito ( béton de ciment coloré semé de graviers blancs, à l'époque poncé à la main, imitation presque parfaite du granit) dont je ne me souviens plus de la couleur.

RÉCIT D'UN ÉLÈVE DES ANNÉES 1936 - 1942 (3e épisode) LES MAÎTRES
Nos institutrices et instituteurs  se nommaient, mesdames…. HUMET, CARTIER, KHOLER,…messieurs….. CURNIER, PRABISS,  ( j'en ai oublié quelques uns) et le directeur Monsieur SICRE , tellement sévère que sa seule  apparition dans la court de récréation figeait de trouille tous ceux qui l'apercevaient, interrompant les jeux un peu rudes tel que "tchitcha la fava "souvent improvisé par les grands du "certif"  qu' il surveillait particulièrement. Quand ces derniers  chahutaient un peu  trop, les petits avaient des gestes ou expressions imagées qui ne se voyaient ou ne  s'entendaient "que là-bas". La punition était stupéfiante;  le délinquant était saisi par les bajoues et soulevé à trente ou quarante centimètres du sol; alors les bras du directeur s'ouvraient et se refermaient en mouvements rapides et mécaniques et le malheureux recevait trois ou quatre claques sur les deux joues en même temps avant  que  l'attraction terrestre le ramène sur le plancher des vaches, cela sans cri ni parole.( personne n'en est mort et personne ne portait plainte car la punition du père était souvent plus rude que celle du directeur.)  En ce temps là les parents pensaient à juste titre que si leur progéniture avait reçu une punition  c'est qu'elle la méritait;  aussi avant toute explication ils doublaient la dose; ensuite on s'expliquait, pas toujours ) . Ce principe nous apprenait à  réfléchir sur  notre  responsabilité et la justification  de la punition avant de se plaindre. C'est ainsi que sans me plaindre j'ai du copier dans une année,   une dizaine de fois la conjugaison d'un verbe à tous les temps, indicatif, subjonctif, conditionnel, impératif compris.  Avec les quatre coups de règle sur les fesses, qui doublaient en cas de récidive, c'était les punitions favorites de Mr CURNIER en CM2. Je me souviens  qu'un certain A.... ,  parce qu'il ne suivait pas le texte au cour de l'exercice de lecture tri hebdomadaire, a atteint le record de trente deux coups sur les fesses bien tendues de l'étourdis maintenu penché en avant par la poigne gauche de l'instit, tandis que la droite tenant la terrible règle en fer se levait et s'abattait à la cadence d'un métronome; chacun dans la classe comptait mentalement chaque impact en frissonnant, se demandant s'il ne serait pas le  prochain. Devant cette démonstration nous redoublions  d'attention  jusqu'à  en oublier que l'heure de la sortie approchait. Quand le timbre strident de la sonnerie retentissait nous avions du mal à retenir un" ouf " de soulagement, et c'est dans le silence et l'ordre imposés que nous sortions et traversions en rangs la cour vers la liberté, je retrouvais Grand-père accompagné du chien Boby dont la principale préoccupation était de marquer son passage au pied de tous les arbres qu'il rencontrait jusqu'à la maison, il y en avait quelques dizaines : après cette escorte il s'accordait deux ou trois heures  de liberté totale.
Maurice CALAS
Note; Deux autres épisodes se trouvent "Rue Maginot", archives d'octobre, le 22