ROBERT LEVESQUE PROF DE PHILO AU LVH
ROBERT LEVESQUE, UN PROFESSEUR DE PHILO DU LVH MÉCONNU
Il a enseigné la Philo au Lycée Victor Hugo pendant quatre années scolaires (de 1964 à 1968)
Nous n'avons malheureusement pas de meilleure photo.Qui pourrait en proposer une autre ?
BIOGRAPHIE DE R. LEVESQUE PAR GUY DUGAS COMMUNIQUÉE PAR MOHAMED BENHIMA ( un de ses élèves de LVH en 1968)
Comme Henri Bosco ou Gabriel Germain, dont les parcours professionnels sont étrangement similaires au sien,c'est une carrière de professeur de Lettres et de philosophie,entamée à Naples(1934) et poursuivie en Grèce(1938),qui conduisit Robert Levesque à s'installer durablement au Maroc-découvert dès les années 30 à l'occasion de plusieurs séjours touristiques qui lui permirent de rencontrer Paul Bowles, François Bonjean, peut-être Paul Odinot et Montherlant , dont son Journal ,inédit en volume, offre d'intéressants portraits.
En septembre 1948, il est nommé à l'école industrielle de Casablanca, puis, dès la rentrée suivante au lycée de Fès, où il enseignera jusqu'en 1964, puis à celui de Marrakech(1964-1968). A son retour en France, Levesque est nommé au lycée de Colmar,ou il prendra sa retraite en 1972. A sa mort,le 12 avril 1975, on retrouvera à son chevet ces dernières lignes écrites en hommage au Maroc: "Vive le Maroc! Bien qu'à deux pas de l'Europe, ce pays garde encore un charme oriental, et je m'en réjouis. Sans être riche en monuments, le Maroc est lui-même monumental: je veux dire qu'il a de la solidité...".
Robert Levesque - qui fut l'ami de Marcel Jouhandeau, Max Jacob et André Gide, et qui est surtout connu comme traducteur des poètes grecs modernes - demeure pourtant le grand oublié de l'histoire des relations culturelles et littéraires franco-marocaines que nous nous employons à retracer dans ces pages. Sans doute parcequ'"homme de plaisir" à la manière de Montherlant des Voyageurs Traqués, personnage modeste, avide d'être plutôt que de paraître, il n'est l'auteur que d'un seul ouvrage: Les Bains D'Estramadure (Gallimard,1964. Prix Valéry- Larbaud,1968)- ses textes brefs et ses très nombreux récits d'excursions ayant été dispersés à travers quantité de revues. Ses vingt années de séjour au Maroc, de fréquentations de ses habitants et des intellectuels-résidents, sa volonté de comprendre et d'approfondir les arcanes de la religion musulmane et de la pensée arabe, en firent pourtant un remarquable connaisseur de l'âme marocaine qui mérite d'être redécouvert".
Ces phrases de Guy Dugas se trouvent dans "L'Appel du Maroc" publié sous la direction de Daniel Rondeau (édité par Institut du Monde Arabe,Flammarion et Malika Editions, 1999).(ISBN: 2-84306-056-7)
Plusieurs traductions et introductions d'auteurs grecs contemporains constituent les premières publications de Robert Lévesque. Les poètes grecs modernes, traduits et édités en 1945 et 1946: Elytis (poèmes), Dionisos Solômos (poèmes et prose), Giorgos Séféris (poèmes), Angelos Sijkelianos (choix de poèmes) dans les collections de l’Institut français d’Athènes.
En 1947 il éditera un choix d’auteurs grecs contemporains dans "DOMAINE GREC 1930-1946". Il participera en 1948 à une œuvre collective "PERMANENCE DE LA GRÈCE" dans laquelle il présentera des textes grecs traduits par Jean Dargos.(Préface de Jean Ballard)
Mais il n'a publié qu'une oeuvre de lui Les bains d'Estramadure (chez Gallimard) alors qu'il quittait Fez pour Marrakech (1964). A l'époque où il quittait Marrakech pour Colmar (1968) il reçut pour cette oeuvre distinguée à juste titre le Prix littéraire Valery-Larbaud qui venait d'être créé en 1967.
L'oeuvre la plus connue de Robert Lévesque n'a pas été publiée de son vivant. Il s'agit de sa correspondance avec André Gide publiée en 1995, vingt ans après sa mort, par l'universitaire Pierre Masson.
Quand Robert Levesque fait, en 1926, la connaissance d'André Gide, il n'a que 17 ans, mais est déjà le protégé de Marcel Jouhandeau et l'ami de Max Jacob, que sa sensibilité et ses dons poétiques ont conquis. Gide représente un modèle de vie pour l'adolescent, qui le fait profiter en retour de sa faculté d'enthousiasme. Un équilibre s'établit vite, qui permet à cette amitié, d'abord littéraire, de s'approfondir. Amoureux de l'aventure, Robert a souvent l'occasion d'approuver la générosité de Gide, avant de partir avec lui et de devenir en Grèce et en Egypte, son compagnon de voyage idéal (1939). Ils repartirent ensemble en décembre 1945 en Italie, au Liban et en Egypte (jusqu'en avril 1946). Le 13 novembre 1947 Gide reçoit le Prix Nobel de littérature. Robert Lévesque enseigne au lycée de Fez quand survient la mort de Gide en février 1951. Devenu un familier du clan Gide et de la NRF, Robert Lévesque est un témoin et un confident privilégié. Les 250 lettres de cette correspondance, complétées par des extraits du Journal de R. Levesque, nous font découvrir un Gide inhabituel, contemporain capital rajeunissant auprès d'un nouveau Nathanaël.
Dans un article de l'Express de 1995 Rinaldi Angelo parle de la relation entre Gide et Lévesque; ci-dessous quelques extraits qui soulignent la modestie de Robert Lévesque:
" Dès que l'un d'eux s'absente, pour vagabonder en Méditerranée, s'établit la correspondance que nous avons enfin aujourd'hui à notre disposition. Elle constitue avec un journal intime et un récit de voyage passé inaperçu en son temps - «Les Bains d'Estramadure» - l'oeuvre d'un auteur qui, par modestie, doutait d'en accomplir jamais une: souvent, en littérature, on atteint le meilleur sans y avoir prétendu. Levesque, nomade appointé par l'Education nationale, riche seulement de deux valises toujours moins lourdes le lendemain que la veille - car, la veille encore, il les avait allégées au profit d'une mendiante grecque - acheva à Colmar, parmi des élèves sans avenir, sa carrière de professeur de philosophie chahuté. Ne s'endormait-il pas au beau milieu d'un cours sur Hegel? Avant sa mort, survenue en 1975, on l'aurait bien surpris en lui prédisant qu'un universitaire, M. Pierre Masson, s'emploierait, des années durant, à rassembler, présenter et annoter ses lettres et les missives de l'illustre ami appelé jusqu'au bout «Cher Monsieur». D'emblée, il a annoncé la couleur: «Je ne veux pas devenir quelqu'un. Je veux être moi. Je ne peux rien faire de mieux que moi-même.» Et Levesque l'a fait tant et si bien que ses lettres égalent et parfois surpassent en intérêt celles de Gide, qui, pourtant, n'a jamais été si sincère, si éloigné des préciosités dont ses livres en marche vers le classicisme s'encombrent encore parfois. C'est que, pas une seconde, Levesque n'est bluffé par l'éclat des relations que l'auteur de «Corydon» lui procure. N'est-il pas présenté à Roger Martin du Gard et à la fine fleur de la NRF, introduit aux décades de Pontigny? Dans ce milieu où le moindre sire n'est qu'intelligent,(...) Levesque conserve son humour et sa lucidité. Il préservera toujours la part de l'enfance qui s'amuse quoi qu'il arrive. Elle correspond en Gide au «Prométhée mal enchaîné» qu'il a décrit et qui, las de cet aigle acharné à lui manger le foie, finira par le rôtir comme un quelconque poulet. Le grand bourgeois(...) ne se lasse pas d'envoyer des subsides à son protégé traité, depuis le début, de pair à compagnon, de l'aider dans ses démarches pour obtenir un poste d'enseignant, d'abord à Rome, puis à Athènes. Du même coup, il adopte sa famille. Il ne se passe rien dans la vie de l'un que l'autre n'en soit aussitôt informé: lectures, passades, découvertes - celle de Michaux, par exemple - maux divers, tristesses de saison (...) Sa capacité d'écoute et d'accueil n'a pas de limites ni sa faculté de rebondir par-dessus les malaises, les fatigues et les désillusions. Sous l'influence de Levesque, l'écrivain, en grand danger de se transformer en monument public, rajeunit et se défie même des certitudes d'une incertitude érigée en doctrine.
Correspondance, 1926-1950. André Gide-Robert Levesque. Presses universitaires de Lyon, 452 p.
Ci-dessous un témoignage de Mohamed BENHIMA, un de ses élèves du LVH:
"J'ai eu effectivement Mr Levesque comme prof de philo en terminale.
Ce que je peux dire c'est que c'était un professeur très "cool". On découvrait la philo et il y avait pendant ses cours, ceux qui étaient très attentifs et ceux qui étaient très distraits.
En nous rendant à son cours , nous n'étions pas "angoissés".
Il avait une particularité. En début d'année,il ne mettait jamais de notes supérieures à 6 ou 7 (sur 20). Les notes ne devenaient significatives qu'à compter du deuxième trimestre."
D'autres parmi ses élèves de LVH voudront compléter ces lignes par quelques souvenirs dans les commentaires.