BONNES FÊTES DE PESSAH ET DE PAQUES !
UNE BRASSÉE DE SOUVENIRS DE JEUNES MARRRAKCHIS DES ANNÉES 42 À 70 : JUIFS, MUSULMANS ET EUROPÉENS DE LA VILLE ROUGE CROISENT LEURS MÉMOIRES

Elsa Nagel rassemble des témoignages d'amoureux de longue date de Marrakech et les présente dans son livre. Elle permet au blog d'en publier un extrait, les pages 162 à 164 à titre d'apéritif en attendant la réception de votre exemplaire.
LE LIVRE VIENT FINALEMENT DE SORTIR
(voir les références pour le commander)
En attendant que vous commandiez et receviez le livre chez vous le blog vous propose un aperçu.
Extrait ci-dessous de C’était hier à Marrakech par Elsa Nagel, éditions La Croisée des Chemins, coll. Essai, 2014.: Pages 162 à 165, (texte et photos) avec l'aimable autorisation d'Elsa.
Des enseignes ont disparu tout récemment, comme Le Bon Lait, une laiterie où l’on venait acheter du lait au détail, avec son pot au lait. Le Bon Lait, situé près des Négociants, est aujourd’hui une pâtisserie.

Devant Le Bon Lait en 1948 – Fernande Amoureux, Marie-Louise Alvarez et sa sœur Mireille, Suzy Humbel (épouse Raynaud), Andrée Humbel (épouse Bonastre), M’Barque et Hassan. (photo Salam Marrakech)
La galerie Bertrand rappelle l’existence du studio Bertrand. Le photographe René Bertrand, installé avenue Mangin, en 1933, avait su « voir » Marrakech et particulièrement le sud du Maroc. Il réalisa notamment des portraits exceptionnels de femmes berbères. Il participa, après l’Indépendance, à la création du Ministère du tourisme marocain.

Les jolies demoiselles de Marrakech devant l’enseigne du Derby, en 1956.(photo Colette et André Angelloz)
A deux pas de la galerie Bertrand, se trouvent les chaussures Derby où les femmes se souviennent s’être chaussées depuis toujours. Au Régal, tenu par la famille Mirgon, elles achetaient des pâtisseries. Les Mirgon sont installés à Marrakech depuis 1935 où ils ont importé leur savoir-faire, perpétué aujourd’hui par leur petite-fille, Ghislaine Mirgon.

« En 1935, mes grands-parents ont quitté la Lorraine où ils avaient vendu leur pâtisserie et ils s’installèrent à Marrakech, rue de la Liberté. Ils connurent un succès immédiat en vendant de la pâtisserie française classique et notamment des spécialités lorraines. Leur bûche de Noël était renommée, ainsi que les Alaska, les esquimaux glacés vendus à l’entracte, dans les salles de cinéma de Marrakech. En 1942, la fabrique fut réquisitionnée par l’armée américaine pour son pain. Après la guerre, grâce aux Américains, nous avons pu profiter d’un modernisme que la France ne connaissait pas encore, comme le frigidaire par exemple. Pour la réfrigération en gros, on cherchait les barres de glace à l’usine La Cigogne qui fabriquait de la bière et de la limonade. Après la guerre, mon père, qui s’occupait désormais de la pâtisserie avait du mal à travailler, faute de matière première.

Ce n’est qu’en 1952-1953 que l’entreprise redémarra véritablement. Mon père décida de fabriquer des biscottes qui étaient alors importées. Cependant, il s’était endetté et l’heure des choix était arrivée avec l’Indépendance. Devait-il quitter le Maroc ? S’il partait, c’était sans rien !
Les industries, liées à la farine, n’avaient pas d’obligation d’être marocanisées. Il décida donc de rester et il s’en sortit grâce aux Américains, basés à Nouasseur et Benguérir, qui passaient commande de pains de mie et de pains pour les hamburgers. Mon père développa l’industrie de la biscotte. Avec ma mère, j’en ai emballé des biscottes Grim ! ...."
Dans ce livre vous trouverez un grand nombre de témoignages de marrakchis connus ou moins connus interviewés dès 2008, certains ne sont déja plus de ce monde.. Voir ci-dessous les numéros de pages qui correspondent à quelques uns des intreviewés.
Marie-Louise GALLAND et sa nièce pages 98-99, 113-114, 118, 216, 218, 220:
"En 1929, Marie et son époux qui possédaient aussi le cinéma Eden, ont tout vendu pour acheter l'hotel Franco-Italien . Ils l'ont rebaptisé hôtel Gallia ......."

Hassan AZDOD, pages 56, 69, 70, 72, 103-104, 166, 169, 206. "...son attelage fonce vers la salle comme s'il allait y débouler. C'est la panique; des babouches volent..."
Robert LUCKÉ, pages 69 et 109: "... le Café de la Paix qui ouvrit en 1946 était en fait le Bal des débutantes. Elles étaient généralement..."

Chama BENZRIOUIL, pages 169-170, 174, 175, 176, 204, 211, " ... on dégustait des tanjiya, ce plat traditionnel de viande cuite à l'étouffée et très épicée. On jouait de la musique. Tout le monde était un peu..."

Henriette BAUCHET, pages 226 à 230. " ... Sur le plateau du petit déjeuner, un matin, au petit déjeuner, un colis nous avait été envoyé dans lequel se trouvait un petit cercueil à notre intention. Nous avons arrêté la construction de l'hotel. Quel serait notre avenir à Marrakech ? Quel statut aurions-nous...?"

Omar BOURAGBA, pages 193-194 parle de son père assasiné: "C'est un martyr. C'était un homme très pieux, juste, et épris de justice qui a été embarqué dans une histoire politique alors que lui-même avait ses idéaux. Il avait souhaité ce qu'il y avait de plus positif..."

Pierre CARTIER, pages 153 à 156. "... le mechmech était un abricot très parfumé. Aussi, en 1934-1935, il profita des chaudières de ce distillateur (pour extraire de l'eau de rose), qui ne fonctionnaient pas aux mois de mai et de juin pour faire de la confiture d'abricots. Après en avoir..."

Charles ELFASSY, page 146;" Charles Elfassy a fait également le choix de rester. par amour de son pays. Depuis plus de neuf siècles sa famille habitait le..."

Annick THEVENIN, pages 220 à 226.: "... Ma mère était de santé fragile, elle tomba malade et son médecin lui préconisa d'aller vivre à la montagne où le climat lui serait bénéfique. C'est ainsi qu'en 1945, mes parents ont repris cette auberge du Sanglier qui fume située sur l'oued..."

Jaafar EL KANSOUSSI, pages 141-142, "... en 41-42, lorsque la marine allemande a accosté au Maroc et que la Wehrmacht commença à chercher à arrêter les juifs marocains, des grands négociants juifs, de Casablanca et de Marrakech, ont trouvé refuge, pendant près d'un mois chez mon grand père. Celui-ci s'est vu..."

Ghislaine MIRGON, pages 114-115, 163-164, 190, ".. Après la guerre, en 45-46, on allait Chez JUJU, une auberge créée par madame Julien, à l'Oukaïmeden, dit Louka. C'était un refuge sans aucun confort mais on aimait ...."
Aziz Ben Abbes TAARJI, pages 171-172: "...Mon grand-père était un cadi; le cadi des cadis. Il rendait la justice à Marrakech. C'était un homme de grande culture dont le fils Bachir, était un avocat et un résistant qui a beaucoup fait pour l'émancipation de la femme. Le Pacha El Glaoui ne supportait pas..."

Père Gilles PÉGURIER, pages 87, 190, 191, 192: " En 1954-1955, jusqu'en 1960, j'ai été attaché à cette chapelle du Derb el Nakous située Riad Zitoun. Ceux de la médina se souveinnent de la cloche de la chapelle, 5000 chrétiens vivaient alors dans l'enceinte..."
Abderrazak BENCHAÂBANE, pages 28, 34, 36, 203: "...le Glaoui avait le bras long, il avait pu faire passer une seguia dans son jardin pour l'irrigation. À sa mort, les serviteurs eurent l'autorisaton de ..."

Roger BEAU, pages 62, 149-150: " Mon grand père, Antonin Faure, était arrivé au début de 1913 et créa une boucherie-charcuterie, place Jemaa-el-Fna, à l'entrée de Riad Zitoun Kdim. Lorsque le Guéliz a commencé à se développer..."

Joseph DADIA, pages 42, 123-124, 132, : "... l'une des malédictions d'usage courant dans les querelles entre mégères consistait à souhaiter à l'antagoniste "Que ton fils joue au ballon !". Cela sous-entend qu'il se retranche de la communauté juive par l'exercice d'une activité incompatible avec la qualité de juif. Le footbal..."
Christine PERRIN, pages 234-235,: "... Je suis à La Mamounia où j'ai une boutique de bijoux depuis 1969. Je garde un souvenir heureux de cette époque où les grands de ce monde séjournaient à l'hôtel et y cotoyaient des..."

Raphaël OHAYON, pages 45-46, 138: "...La Kissaria nouvelle commence dès l'entrée du Mellah avec sa porte en arc de triomphe qui a toujours abrité une confrérie de marchands de tissus..."
Luc FANTUN, pages 74, 81, 98, 110, 122, 189, 196: "... de nombreux européens vivaient en Médina, des Français, des Espagnols, des Italiens, des Portugais, Avec nos voisins marocains l'entente était très cordiale. Au moment du ramadan, à la rupture du jeune, nos voisins nous apportaient..."

Simi OUAZANA, pages 83, 131-132, 140-141, 145 : " ...Nous fêtions le réveillon au Casino de Marrakech. La salle de jeux était pleine et un orchestre jouait. Au matin notre bonheur était d'aller manger des sfenjs sur la place..."

Robert ANTON, pages 91, 99, 100, 107, 112, 120, 184: ".. un zona me faisait souffrir et ma mère m'a emmené voir M. Vallier. Il m'a fait des signes de croix au-dessus de mon zona qui a très vite disparu. Ma soeur également est allée le consulter. Elle avait une dizaine..."

Arrik DELOUYA, pages 123, 129-130, 145: "Mon grand père était un homme heureux dans sa ville de Marrakech, lorsque, en 1956, des agents sionistes sont venus le voir; en l'espace de quelques heures ils l'ont convaincu de quitter le Maroc..."

Michel DUPRÉ, pages 161-162, 194-195, 198: "Après l'Indépendance, certains fonctionnaires français sont restés en place au service du gouvernement marocain dans le cadre de la coopération. Cela a été le cas de mon père, (...) Il a formé et mis en place des opérateurs radio jusque dans les bleds les plus reculés (...) Un jour de 1969 il a trouvé deux gardes devant sa porte et l'accés de son atelier lui a été interdit. Tout ce qui nous appartenait lui a été confisqué et ..."

Gabriel BITTON: page 145:".. Je voulais poursuivre des études supérieures en sciences mais le Maroc avait choisi l'arabisation et faute d'enseignants marocains, il avait fait (...) Je me suis senti trahi..." .

Colette GIL/ANGELLOZ, page 197, "... À Noël, les familles des aviateurs se retrouvaient à la Base 707 où le père Noël arrivait en hélicoptère. Il descendait sur le tarmac avec sa hôte sur le dos, pleine de..."
Ces morceaux de textes ne disent pas tout, pour en savoir plus il faudra vous procurer un exemplaire du livre d'Elsa Nagel. Vous pouvez aussi envoyer au blog le récit de vos souvenirs afin qu'ils puissent être partagés et que d'autres récits viennent compléter le grand puzzle de notre histoire. Merci à Elsa Nagel, merci à tous ceux qui ont pris le temps de rassembler leurs souvenirs.
C'était un projet qui est à ce jour REALISE ! Si j'avais du l'entreprendre ,j'aurais eu des vertiges devant les pages blanches à remplir tant le sujet semble vaste.
Souhaitons maintenant à toutes celles et ceux de ce Marrakech ,à la lecture de cet ouvrage,de retrouver notre immuable passé. Marrakch'Amitiés Jean Marc